Vrais piliers de l'économie mondiale, les banques sont pourtant depuis longtemps identifiées comme des acteurs majeurs du dérèglement climatique. Outre leurs émissions directes et indirectes liées à leur fonctionnement interne et aux opérations des usagers, elles sont aussi les premiers financeurs d'entreprises reconnues pour leurs activités polluantes. Néanmoins, par obligation et par éthique, il devient indispensable de s'engager vers la réduction des émissions de gaz à effet de serre et la compensation carbone, avec de multiples avantages à la clé.
Comme toutes les entreprises, les établissements bancaires ont des locaux qu'il faut chauffer, rafraîchir et entretenir ainsi que des véhicules de société à alimenter (émissions directes du Scope 1). Du côté des émissions indirectes significatives, on compte la consommation électrique des bureaux (Scope 2) puis tout le reste qui forme le Scope 3 : cycle de vie des énergies fossiles pour les véhicules, les achats de produits et services, choix des sociétés de transport, les déplacements professionnels…
À cela s'ajoutent toutes les opérations bancaires effectuées par les usagers et, surtout, les financements d'entreprises à fort impact environnemental sous la forme d'investissements, placements financiers, etc. Si bien que les banques sont alors considérées comme les sociétés les plus fortes émettrices de CO2 au monde ! Bien que pointées du doigt par les ONG dans des rapports alarmants, les banques ne peuvent faire autrement puisqu'elles sont indispensables au fonctionnement global de l'économie, mais elles peuvent néanmoins choisir sur quelle entité elles investissent…
D'après les derniers rapports d'OXFAM et de Reclaim Finance en 2023, les 60 plus grandes banques mondiales (dont les trois principaux établissements français) ont financé les entreprises d'énergie fossile à hauteur de 5,5 billions de dollars depuis la signature de l'Accord de Paris en 2015, en totale contradiction avec ses objectifs. Il est donc plus que jamais nécessaire aux sociétés bancaires de renverser la vapeur et de s'engager activement dans la lutte contre le réchauffement climatique en finançant des acteurs économiques plus verts, en réduisant leurs émissions et en compensant le carbone d'entreprise irréductible.
Avec un tel poids dans l'économie mondiale, les banques ont un rôle majeur à jouer si on veut atteindre l'objectif de la neutralité carbone à l'horizon 2050 et conserver un changement climatique supportable. En sélectionnant leurs placements financiers, elles influent directement sur la mise en œuvre des objectifs de l'Accord de Paris et elles peuvent donc faire pencher la balance vers les vrais acteurs du développement durable. Un choix pris par La Banque Postale en 2021 afin de ne plus financer les énergies fossiles dès 2030, mais aussi par le Crédit Coopératif, la NEF, Helios et de nombreuses banques vertes apparues ces dernières années.
Au-delà de la contribution à l'effort général, elles mettent en valeur leur image auprès des usagers, des entreprises cibles et des investisseurs, se démarquant ainsi de la concurrence. Plus d'attractivité signifie plus de retombées financières. D'autant plus que les banques font partie des sociétés qui ont l'obligation de publier leur bilan des émissions de gaz à effet de serre (BEGES) dans leur déclaration de performance extra-financière (DPEF).Enfin, toutes les actions menées pour réduire leur impact environnemental les rapprocheront des directives nationales, européennes et internationales avec l'obtention d'un label et/ou de subventions et valorisations (Pacte Vert Européen…).
Après avoir réduit les émissions de leur activité, les sociétés bancaires peuvent compenser les émissions irréductibles, qu'elles soient directes, indirectes ou financées. La première solution de compensation carbone est la contribution à des projets de développement durable. Pour cela, les banques ont accès au marché de conformité du carbone de l'ONU.
Décliné en mécanisme de développement propre (MDP) et en mise en œuvre conjointe (MOC), il permet aux grandes entreprises d'obtenir des crédits carbone (un crédit carbone est égal à une tonne équivalent CO2) en échange de financement sur des projets reconnus, puis de les échanger, notamment sur le Système Communautaire d'Échange de Quotas d'Émissions (en anglais EU-ETS : European Union Emission Trading Scheme).
Au-delà de ce dispositif, les banques qui veulent s'engager davantage peuvent également compenser leurs émissions carbone sur le marché de compensation volontaire, ouvert à tous. En revanche, les crédits carbone acquis ne sont pas échangeables sur le marché des quotas de l'ONU, mais ils le sont via des labels nationaux (label Bas carbone, Climate Action Reserve…) ou des labels internationaux (label Gold Standard, Verified Carbon Standard, Climate Community & Biodiversity, Australian Carbon Credit Units…).
Ce procédé a déjà été choisi par le Crédit Agricole et LCL en France, afin de compenser les émissions résiduelles du placement financier. Il existe aussi de nombreuses ONG qui ne délivrent pas de crédit carbone lors de financement de projets durables mais une certification, tout aussi intéressante pour la banque soucieuse de son impact environnemental et de son image. Enfin, certaines banques proposent à leurs usagers de participer activement à la démarche de compensation carbone en les incitant à compenser leurs opérations bancaires par le financement de projets liés aux énergies bas carbone ou en adaptant les offres commerciales vers des investissements verts (green bonds…).